Salle de presse




L'Est républicain

3 février 2003. Marie-Ange CREUSOT

Un solitaire dans la meute

Ainsi se définit Bernard Visse.
Mais qui est donc cet homme qui, dans une autre vie, aimerait être sculpteur ?


Même au milieu de la foule, même dans la brasserie du coin pleine à craquer, il semble détaché des autres. « Je suis comme un Sioux qui déteste marcher en file indienne ».

Bernard Visse travaille à la mairie depuis vingt ans. Homme de l'ombre, il a connu le placard, réservé parfois à ceux qui ne savent pas ravaler ce qu'ils pensent. « La franchise m'a valu de solides inimitiés ». Bien malin celui qui arrivera à le classer politiquement. « Ceux de droite pensent que je suis à gauche, ceux de gauche pensent que je suis à droite, et au centre, je ne sais pas ».

Homme de mission faute d'être celui de la culture, comme lui avait promis un certain M. Séguin, Bernard Visse est entré à la mairie sur la demande de Jean-Paul Houvion, pour créer le Bureau Information Jeunesse. « Moi, j'étais parti pour être prof ou journaliste ». Après un détour d'un an à Rennes, au poste de directeur du centre information jeunesse de Bretagne, Bernard est revenu à ses racines, dont se nourrit son pouvoir créatif. L'association RVV, c'est lui. Radio Nostalgie aussi. Idem pour les Imaginales. On lui doit aussi la mise en place des Comités d'intérêt de quartier. En télématique, il a créé le premier site de la ville, et a relancé il y a deux ans le salon CitéBois. Il a également piloté la préfiguration d'Images Plus en 1985.

Echanges avec Jean-Louis Barrault

On a souvent du mal à lui donner un âge. « Je suis né à la clinique du professeur Manteaux de la rue Thiers, il y a 50 ans, un 15 novembre. Je suis donc un enfant de la Saint-Valentin ».

A Uxegney où habitent ses parents, Bernard ne perdra aucune miette du spectacle que lui offre la nature. « J'étais buissonnier pour aller à l'école. Je passais à travers champs ». Son entrée en 6e, à Jules-Ferry, lui fera perdre le goût de l'école. C'est au lycée Lapicque que son aptitude à la créativité va se dévoiler. En 1971, il publie un disque de poèmes. En 1972, il crée « le Théâtre de lumière ». D'emblée, il s'attaque à la mise en scène de pièces ardues. Comme Yerma de Federico Garcia Lorca. Le jeune homme engage en même temps - et sans frustration - une correspondance avec le grand Jean-Louis Barrault de la Comédie Française, avec Roger Caillois, anthropologue, membre de l'Académie Française...

Et toujours au fond de Bernard Visse, ce besoin d'être rattaché à sa terre. Homme de livres -il parcourt les bibliothèque de la France entière-, il n'est jamais aussi heureux que dans un polar qui se passe « ici, chez moi en France ». Très conservateur -« j'ai un garage rempli d'archives »-, Bernard Visse a soif d'histoires locales. Depuis ce jour où, à 11 ans, il a recopié un bouquin sur Uxegney. « J'allais sur place et ça me faisait rêver de savoir que les Romains étaient passés par là ».

Sa thèse de doctorat en littérature passée avec succès en 1986, il l'a évidemment dédiée à un enfant d'ici : le poète Gilbert, précurseur du romantisme. Né en 1750 à Fontenoy-le-Château, Gilbert est mort à trente ans, en avalant la clé d'un coffret ! « Il avait eu un accident de cheval. Il avait été trépané. Il n'avait plus toute sa tête »...

Président depuis 1994 de l'association des Amis du Musée, Bernard Visse travaille actuellement sur un roman. Une histoire qui se passe bien sûr dans les Vosges, et dans le futur. Toujours en avance sur son temps, sur son âge aussi, Bernard Visse a décidé cette fois de prendre quatre à cinq siècles d'avance.


Bernard dans l’un de ses univers : le musée. Il est président des Amis du musée depuis 1994.
Photo © Stéphane Calmels.